Depuis quelques années journalistes, politiques, blogueurs, publicitaires et communicateurs de tout poil ont une nouvelle obsession : rassurer tout le monde. Machin tient à nous « rassurer » sur l’état du ciel ou du trafic avant le week-end, Truc tient des « propos rassurants » sur l’état de la couche d’ozone, Bidule se sent « rassurée » avec sa serviette hygiénique ou son déodorant… Effet de mode issu d’une époque anxiogène ? Tentative d’attirer l’attention d’un public saturé d’informations ? Paresse intellectuelle ? Quoi qu’il en soit, chaque fois que je lis ou entends ce mot, mon niveau de stress fait un bond vertigineux et les yeux me sortent de la tête : « Qu’est-ce qu’il a encore celui-là à vouloir me RASSURER !! »
Je n’ai pas besoin d’être rassurée à tout bout de champ, merci
Le Larousse nous indique que « rassurer » signifie « rendre confiance à quelqu’un, le délivrer d’une inquiétude ». Or, je tiens à rassurer mes compatriotes : même si ma situation n’est pas toujours fabuleuse, je n’ai pas perdu confiance en moi ni n’ai besoin qu’ils me délivrent de pseudo-inquiétudes vu que :
- je suis adulte ;
- j’ai un cerveau fonctionnel ;
- j’ai assez de mes préoccupations, qui se résument au niveau de mes finances et à l’état de santé de mes proches.
Par conséquent, inutile de chercher à me rassurer sur l’état du trafic ou les performances de mon déo : je m’en tamponne. Je ne lis pas les journaux, les blogs, ni ne regarde les actualités télévisées et les pubs pour être rassurée, mais pour que :
- Les publicitaires me fassent découvrir de nouveaux produits et services ;
- Les banquiers me renseignent sur les meilleurs placements et leur niveau de sécurité (pour mes futures royalties 🙂 ) ;
- Les journalistes m’informent de la situation du pays, du monde ; de l’évolution des lois, de la science et des idées ; éventuellement de quelques ragots divertissants ;
- Les politiques me démontrent que les OGM, pesticides et nanoparticules ne sont pas nocifs pour la santé ;
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- Les entreprises me certifient que les produits qu’ils me vendent sont fiables, de bonne qualité et conçus par des personnes soucieuses de ma santé et de mon intérêt ;
- Les médecins me détaillent les bénéfices et risques à court et long terme des traitements qu’ils proposent ;
- Le gouvernement me prépare à affronter les mutations économiques et technologiques ;
- Les pouvoirs publics m’avertissent des dangers qui me menacent directement – catastrophes naturelles, épidémie, attaque terroriste – afin que je puisse éventuellement agir pour m’en prémunir, etc.
Mais après tout, peut-être ai-je tort. Peut-être faut-il rassurer les Français comme de petits enfants avant le passage du marchand de sable ?
Les Français sont-ils tous flippés ?
À force d’entendre tous ces intellectuels rassurer la population française, je finis par me demander si la France n’est pas devenue un pays de vieux trouillards sous anxiolytiques. Pourtant, les « vieux » qui nous ont quittés récemment comme Johnny Hallyday, Simone Veil, Jean d’Ormesson, Danièle Darrieux, Jean Rochefort, Jeanne Moreau, ne semblaient pas avoir besoin d’être rassurés en permanence. Quant aux jeunes Français que j’observe dans le métro, ils ne paraissent pas plus timorés que moi.
Je suis donc obligée de conclure qu’une bonne partie des journalistes, politiques et publicitaires Français ne font que projeter leurs propres angoisses sur la population et ne sont rien d’autre qu’une bande de poltrons prenant leur cas pour une généralité. Cependant, si ce tic verbal est inconscient ou résulte d’un malentendu, il est urgent d’agir…
Maintenant, on arrête de rassurer !
Pour éviter de glisser sur cette pente pas rassurante, je suggère de bannir le verbe « rassurer » et ses petits frères à connotation émotionnelle de tous les articles d’information, communications officielles, publicités. Je ne parle évidemment pas des articles « putaclics » – qui reposent sur l’émotionnel – je parle des titres de médias en principe sérieux qui abusent de :
- Faut-il s’inquiéter, s’alarmer, craindre…
- Le soulagement, l’inquiétude, le malaise de…
- Les chiffres rassurants, inquiétants, préoccupants, catastrophiques de…
- Machin tient à rassurer, apaiser les craintes…
- La colère, le désespoir, la joie de…
Au lieu de chercher à capter l’attention du public en jouant avec ses émotions, qu’on expose les faits, les coûts, les bénéfices, les problèmes, les solutions envisagées et les résultats obtenus. Nous jugerons ensuite s’il y a lieu de demander le remplacement de quelques personnes non pas inquiétantes mais… incompétentes.
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La vie n’est pas faite pour être rassurante
Jusqu’à presque 30 ans, j’ai mené une vie pouvant être qualifiée de rassurante : pas de problème de cœur, pas de problème d’argent, pas de problème de santé pour moi ni mes proches. Puis j’ai quitté un emploi « sûr » pour rejoindre le monde du spectacle qui n’assure rien du tout et ne rassure personne. Est-ce que je suis plus inquiète, stressée, moins rassurée ? Assurément. Est-ce que je le regrette ? NON. Pourquoi ?
Je ne regrette rien car si ma vie n’est pas rassurante, elle est en revanche devenue surprenante, passionnante, pleine de rencontres inattendues, riche d’enseignements, épanouissante, constructive, aventureuse. Bref, elle est devenue la Vie. Comme j’ai dû apprendre à gérer l’incertitude, j’ai appliqué ce conseil de Bouddha :
Si un problème a une solution, il ne sert à rien de t’inquiéter
Et s’il n’en a pas, t’inquiéter ne sert à rien.
Chaque fois qu’une tuile semble viser ma tête, je me demande deux choses :
- Vais-je pouvoir l’éviter ? Si oui, je ne m’inquiète pas ;
- Si je ne peux pas l’éviter, je me demande aussitôt : comment gérer les conséquences ?
Je te rassure, tout le monde se prend des tuiles
Certaines tuiles m’ont fait plus de mal que d’autres. Avant de maudire le ciel et tous les saints en exigeant le remboursement de mes soins, j’ai appliqué un autre conseil de Bouddha qu’on pourrait traduire par : avant de crier à l’injustice, va frapper aux portes de tous tes voisins. Si un seul d’entre eux ne s’est jamais pris de tuile sur la tête, je rembourserai ta pommade et ton paracétamol. A ce jour, l’Éveillé n’a jamais rien eu à me rembourser… Je vois des tas de gens avec des vies et des métiers soi-disant rassurants qui se prennent de bien plus grosses tuiles que moi.
Ma vie aurait-elle été moins anxiogène pour moi et mes proches si elle avait été plus conventionnelle ? Rien n’est moins sûr. Par contre, elle aurait été plus chiante. 🙂
Dis donc, ton blog il est pas rassurant…
Ben non, je n’ai pas créé ce blog pour rassurer qui que ce soit. Je l’ai créé pour témoigner de mon parcours d’auteure indépendante, proposer des idées sur tout et n’importe quoi, divertir ; inciter à se faire confiance, à prendre des risques en mesurant les conséquences… inciter à vivre en somme. J’écris aussi ces articles pour montrer, confirmer qu’on peut – et peut-être doit – suivre ses rêves et ses envies au lieu de chercher la sécurité à tout prix. Pourquoi ? Parce que – et ce n’est pas un scoop : à la fin… on finit tous de la même façon. Est-ce rassurant ? Sans doute que non. Mais comme on n’y peut rien, pas la peine de s’inquiéter !
Excellente chronique !!!.. et comme toi j’aimerai bien entendre des news optimistes car il y en a sur cette terre des gens qui accomplissent et vivent des choses merveilleuses seulement ça ne fait pas vendre !.. soi disant, y’a que les histoires belliqueuses et faits divers des plus sordides qui font palpiter nos coeurs ?!.. J’te rassure j’en fais pas partie ;-))