Considérer les compétences des travailleurs plutôt que leur profession, généraliser le tirage au sort dans les procédures d’embauche, rémunérer davantage les métiers difficiles ferait baisser le chômage en France.
La plupart des politiques français sont d’accord sur un point : le chômage est avant tout de la faute des chômeurs. Parce que c’est bien beau de vouloir relancer l’économie, multiplier les primes à l’embauche, baisser les charges sociales, dépenser des fortunes en formation, si ces feignants de chômeurs ne correspondent pas aux profils recherchés on n’arrivera jamais à résorber le chômage !
Le chômeur français est un être contrariant
Il faut reconnaître que le chômeur est un Français encore plus contrariant que les autres Français, ce qui n’est pas peu dire :
- il est trop jeune ou trop vieux ;
- c’est une femme alors qu’on veut un homme (ou l’inverse) ;
- il a des mœurs bizarres ;
- il a un nom qui sonne pas trop trop français ;
- il a une tête qui fait encore moins Français, quoi qu’il en dise ;
- il a une prothèse, un fauteuil roulant ;
- il veut pas changer de région : pour rester près de papa maman et ses copains, parce que sa femme a un boulot dans son bled – elle, parce qu’il y a acheté une baraque, parce qu’il a ses racines là-bas, etc. ;
- il veut pas bosser dans n’importe quel secteur : le ménage c’est pas assez chic ; le bâtiment c’est trop dur ; s’occuper des vieux c’est déprimant ; conseiller des clients c’est chiant, etc. ;
- il a rarement le bon nombre d’années d’expérience dans le poste proposé, quand il a une expérience dans le poste tout court ;
- et puis il y a les pires, ceux dont on ne sait plus quoi faire : ceux qui ont trop de diplômes…
Non mais franchement, ils exagèrent tous ces chômeurs. Que veux-tu qu’on en fasse ?!
Les chômeurs qui ont toujours tout bon
Il existe pourtant une petite catégorie de gens qui échappent aux discriminations et à la dictature du CV. Ils peuvent avoir des noms bizarres, des têtes pas très couleur locale ; ils peuvent être homo, très jeunes ou très vieux, on leur demande rarement d’avoir travaillé dans le même poste ni dans la même branche d’activité. De plus, ils n’ont généralement aucun mal à se recaser quand ils perdent leur job. Ce sont… les grands patrons.
On fait confiance à leurs compétences, leurs capacités d’adaptation, d’apprentissage et on leur demande de faire le boulot. Point. Pourquoi ne ferait-on pas de même avec tout le monde ?
Chaque chômeur peut devenir un petit patron
Je suis convaincue qu’on n’arrivera à faire baisser le chômage qu’en considérant les chômeurs comme des personnes possédant des compétences, des envies et un potentiel d’adaptation important. Ceci implique de :
- valoriser la personnalité du candidat, sa motivation, son enthousiasme plutôt que se focaliser sur des aspects techniques ;
- revoir le CV traditionnel : il incite à valoriser un parcours dans une même branche, quand ce n’est pas dans le même métier. Or, l’économie mute vite. Il est donc peu probable que le métier exercé en début de carrière existe encore 20 ou 30 ans plus tard ;
- généraliser un CV par compétences ;
- rédiger des offres d’emploi en conséquence : on cherche des compétences, pas x années d’expérience dans un poste similaire ;
- faire confiance à la capacité du candidat à se former à un nouveau poste.
Avantages de ce changement de méthode
- les personnes cesseront de se définir toute leur vie par le même métier ;
- elles pourront changer de métier, et même en exercer de très différents au cours de leur vie, en fonction de leurs goûts et des opportunités ;
- elles seront moins tentées de s’encroûter 20 ou 30 ans dans la même entreprise ;
- il sera moins nécessaire de se délocaliser pour retrouver un emploi, car chacun pourra utiliser ses compétences dans une autre branche ;
- personne n’hésitera à se former si les compétences acquises sont reconnues et valorisées ;
- les jeunes seront encouragés à être curieux, à prendre des risques ;
- les personnes qui ont connu des métiers et des secteurs variés seront bien plus ouvertes et innovantes dans leur poste, apportant des solutions jamais envisagées auparavant.
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Gagner plus pour se faire chier plus
Quand j’entends dire que les chômeurs ne trouvent pas de travail parce qu’ils sont trop exigeants, je me demande si je dois pleurer ou en rire. S’il y a pléthore de postes vacants et pas de candidats, qu’est-ce qu’on fait dans une économie libérale : on augmente les salaires ! Même un étudiant en première année de Master d’Économie sait ça.
Combien on parie que si on double ou triple le salaire des ouvriers en bâtiment, des conseillers clientèle, des aides-soignants et des personnes qui font le ménage, on va en trouver en veux-tu en voilà ? Quitte à faire ce travail en attendant un poste qui plaira davantage.
Si un boulot ne trouve pas de candidat parce qu’il est trop dur ou trop chiant, il suffit de considérer normal de le rémunérer davantage. Ce qui peut donner un bon slogan pour la présidentielle. Et résoudra le problème, qui n’en est pas un, des métiers joliment dits « en tension ».
Embaucher par tirage au sort
En attendant de légiférer sur la longueur du CV, le nombre et la nature des rubriques autorisées par le ministère de l’Économie, comment faire pour favoriser la diversité dans les entreprises ? Les préjugés ont la peau dure. Et plus une personne doit passer d’entretiens lors d’une procédure d’embauche, plus elle a de chances de se faire éliminer sur des critères non professionnels.
Pour éviter ces filets à préjugés successifs, je propose de choisir la personne embauchée par tirage au sort parmi les candidats à compétences équivalentes. Si l’embauche se passe mal, on ne pourra pas accuser untel ou tel autre de manque de discernement. Cette méthode peut donc inciter les recruteurs à prendre plus de risques dans la sélection des candidats.
Et si la sélection finale est représentative de la diversité des candidatures reçues, personne ne pourra accuser l’entreprise de discrimination à l’embauche… même si tous les membres de son personnel s’appellent Dupont ou Durand.
Halte au gaspillage des Français !
Les candidats aux élections sont prêts à tout pour faire baisser les chiffres du chômage, mais proposent toujours les mêmes recettes décevantes…
Lire aussi : Pour le vote contre !
Et si ces mêmes candidats cessaient de voir le chômage comme une statistique à maîtriser mais voyaient les chômeurs comme des personnes possédant une énorme réserve d’énergie, d’innombrables compétences inexploitées, un gigantesque potentiel à développer ? Trois millions de personnes rêvent de travailler, mais sont bêtement laissées sur le banc de touche. Arrêtons de les gaspiller et aidons-les à entrer sur le terrain. Peut-être qu’avec eux, nous serons mieux armés pour affronter les défis de la révolution numérique.
Suzanne, Présidente, vite !!!!!!
Merci beaucoup Sandra, mais… non merci 🙂
comme quoi en se creusant un peu les méninges, agrémenté de bonne volonté, on en trouve des solutions !!! mais que font nos politiques ? À trop se masturber le cervelet y’a plus rien qui en sort !
Bonsoir Suzanne,
Je viens de créer mon blog, j’aimerai publier votre article.
Qd on est jeune, on croit au père Noël, après, on vote!
Bonjour, super vos articles!!! On se retrouve tous dans vos mots 🙂
Moi j’ai fait ça sous forme de vidéos… N’hésitez pas à jeter un oeil à l’occasion!!!!
Merci pour votre visite Miss. J’ai vu vos premières vidéos : elles sont bien conçues, amusantes et prometteuses, mais je ne vois pas encore où vous voulez en venir. Bonne continuation ! A une prochaine fois, Suzanne